• Transformer l'Union européenne, renégocier les traités... Une escroquerie intellectuelle ?.Union européenne et souverainisme. 

     

    Peut-on transformer l'Union Européenne ?

    Le sujet est complexe. Cependant, il est intellectuellement indéfendable de dire à des électeurs que l'on va "changer cette Union Européenne", ou que l'on va aller vers une "Europe plus sociale", une "Europe des travailleurs", ou encore vers une "Europe des nations".

    La formule « renégocier le traité européen » relève de l'abus de langage : il ne s'agit pas, en effet, de renégocier ou de réviser un traité mais, plus exactement, une ou plusieurs dispositions parmi les quelques cinq cents (500) contenues dans le traité et qu'il est impossible, au plan juridique,  d'aborder globalement...

     On avait simplement oublié de vous le dire.

    Examinons les faits d'un point de vue juridique, le seul qui prévaut dans le cadre de n’importe quel « contrat », en l’occurrence, les traités européens.

    Au sein de l'Union Européenne, le Traité de l'Union Européenne (TUE) et le Traité de Fonctionnement de l'Union Européenne (TFUE), rassemblent toutes les dispositions issues des Traités de Rome, Maastricht, Amsterdam, Nice, Barcelone et Lisbonne.

    Ces deux traités TUE et TFUE constituent une forme de "constitution de l'Union Européenne" puisqu'ils définissent le rôle des différentes institutions de l'U.E. et organisent les relations entre celles-ci.

     Ces deux traités s'imposent à la France en vertu de l'article 55 de sa constitution.

    Dans le TUE, l'article 48 envisage la manière dont les traités peuvent être modifiés. Il existe deux procédures pour ce faire : 

     * La procédure de révision ordinaire.

     * La procédure de révision simplifiée. Cette dernière ne peut concerner que la troisième partie du TFUE relative aux politiques et actions externe de l'U.E.

    La procédure ordinaire, quant à elle, permet à tout gouvernement de tout état membre, au parlement européen ou à la commission européenne, de soumettre au "Conseil" des projets tendant à la révision des traités.

     Ces projets peuvent tendre à accroître ou à réduire les compétences attribuées à l'U.E. dans les traités.

     Ces "projets" sont transmis par le Conseil au Conseil Européen et notifiés aux parlements nationaux.

     Attention : le Conseil et le Conseil Européen sont deux entités différentes.

    Le Conseil Européen est la réunion de l'ensemble des chefs d'états et de gouvernements de l'U.E.

    Le Conseil est une structure variable selon les "sujets" abordés. C'est la réunion des ministres des états membres de l'U.E. pour un sujet donné.

     Par exemple :  le Conseil de l'agriculture et de la pêche réunira les ministres de l'agriculture et de la pêche de tous les états membres. Il existe ainsi dix(10) formations possibles, prévues par les traités en ce qui concerne le Conseil.

    Puisque c'est le Conseil qui est saisi en premier lieu de tout projet de révision, la première chose à faire est d'identifier la ou les dispositions à réviser pour que la formation appropriée du Conseil puisse statuer à la majorité simple, sur une décision favorable à l'examen de la ou des modifications proposées.

     N'oublions pas que la construction juridique du traité (TUE ou TFUE) ne permet pas une approche globale et plus simple...

    Dans le cas où la France souhaiterait renégocier les traités ou certaines de leurs dispositions, la première initiative à prendre, selon l'article 48 du TUE, est de saisir le Conseil du projet en sachant que celui-ci peut se réunir selon dix formations différentes.

    La première étape consiste, par conséquent, à identifier la disposition à "réviser" afin de déterminer quelle sera la "formation" du Conseil apte à se saisir de ce projet de révision.

     La "révision" non pas d'un traité mais d'une ou plusieurs dispositions d'un traité, n'est pas négociable par les chefs d'états et de gouvernements de l'U.E.

    La procédure est d'une grande complexité :

      1) Le "Conseil" est saisi d'un projet de révision des traités. Il doit, lors d'une première étape, consulter le Parlement européen et la Commission européenne. 

       2) Le "Conseil" adopte à la majorité simple (15 sur 27 actuellement) une décision favorable à l'examen des modifications proposées. C'est le début d'un long parcours du combattant...

       3) Le président du Conseil européen doit alors convoquer, dans une seconde étape, une "convention" composée de représentants des parlementaires nationaux, des chefs d'états ou de gouvernement des états membres, du parlement européen et de la commission européenne.

      4) Cette "convention" examine les projets de révision et adopte, par consensus, une "recommandation" lors d'une conférence des représentants des gouvernements des états membres.

      5) Les chefs d'états et de gouvernements, réunis dans une conférence, arrêtent, à l'unanimité, les modifications à apporter aux traités.

     6) Les modifications entrent en vigueur après avoir été ratifiées par tous les états membres conformément à leurs règles constitutionnelles respectives...

      Si, à l'issue d'un délai de 2 années, à compter de la signature d'un traité, "modifiant" les traités, les 4/5ème des états membres ont ratifié ledit traité, et qu'un ou plusieurs états membres on rencontré des difficultés pour procéder à ladite ratification, le Conseil européen se saisit de la question.

    Sur ce point, l'article 48 du TUE n'envisage rien de plus précis...

    S'agit-il d'influencer les pays n'ayant pas ratifié le traité modifié ? S'agit-il de trouver un nouveau consensus ? Rien n'est précisé...

      En revanche, en cas d'opposition de l'un des parlements nationaux des membres de l'U.E., la décision ne peut pas être adoptée...

      En résumé : la "renégociation des traités" ou projet de révision des traités, bien que prévue dans le TUE, à l'article 48, en engageant une cohorte de responsables : "conseil", Conseil européen, Commission européenne, parlement européen, parlements nationaux, convention dédiée, dans un processus nécessitant le plus souvent "l'unanimité", en devient irréalisable. Et c'est voulu !

      Le processus mis en œuvre et ses contraintes d'unanimité rendent, statistiquement, tout projet de révision des traités irréalistes...

      Si la révision des traités a bien été envisagée, elle est rendue, de facto, impossible par la complexité requise pour la mise en œuvre d'un projet de modification d'une seule disposition. 

      Qu'en serait-il pour la révision de nombreuses dispositions ?

      L'unanimité requise sur un sujet rend toute modification improbable sinon impossible.

      Voilà pourquoi les Anglais ont choisi la procédure prévue à l'article 50 pour une sortie de l'U.E.... 

    Par ailleurs, certains candidats, conscients des limites de la « théorie du changement des traités » ont récemment sorti une variante : remettre en question la hiérarchie des normes et donc, la supériorité des traités par rapport au droit national. Cela passerait par une réforme constitutionnelle – « "une réforme constitutionnelle qui ferait qu'on modifierait l'article 55 de la Constitution, ce qui aurait pour effet que la loi postérieure deviendrait supérieure à un traité". Dans tous les cas, une réforme très difficile à valider au niveau national : une révision constitutionnelle nécessite que l'Assemblée nationale et le Sénat se mette d'accord sur un texte, au mot près. Ce texte doit ensuite être adopté par référendum ou par la majorité des 3/5e des suffrages exprimés des deux chambres du Parlement réunies en Congrès à Versailles.

     

    Une réforme qui ne manquerait pas de nous occasionner des sanctions, notamment financières, au niveau européen : la BCE n’hésiterait pas à nous faire du chantage pour le rachat de notre dette colossale qui consiste à racheter sur le marché secondaire les obligations souveraines des Etats de la zone euro qui font face à la défiance des investisseurs qui exigent des primes de risques élevés pour acquérir ces titres…

     

    Réveillez-vous ! Cela fait plus de vingt ans que tous les candidats aux élections européennes vous disent qu'ils vont changer l'Europe, modifier les traités, et s'engagent à le faire tout en sachant que cela leur sera impossible. Ce sont justement ceux-là qui sont invités dans tous les médias.

    Ceux qui disent la vérité, c'est-à-dire la même chose que ce qui est exposé ici, sont invisibilisés, censurés...

    Heureusement, il y a les médias alternatifs pour leur permettre de se faire entendre.

    Posez-vous les bonnes questions ! Ces élections européennes de juin 2024 sont notre dernière chance d'inverser ce projet mortifère européen.

     

    Partager via Gmail Yahoo!

    votre commentaire
  • L'EUROPE EN HERITAGE

     

        

    Partager via Gmail Yahoo!

    votre commentaire
  • Déboires en série pour la Bundeswehr (armée allemande)La faillite des équipements radio

    L'actuel ministre fédéral de la Défense Boris Pistorius s’est montré récemment « quelque peu ennuyé » pour répondre aux parlementaires et aux journalistes. La raison en est l'incident plutôt embarrassant des matériels radio. La Bundeswehr avait commandé à Rohde & Schwarz des équipements radio numériques de pointe pour environ un milliard d'euros. Ceux-ci étaient destinés aux quelque 13 000 véhicules de la « Chancellor Division ». Cette unité, la 10e Division blindée, devrait être à la disposition de l'OTAN en tant que grande unité pleinement opérationnelle à partir de la fin de l'année prochaine. Le chancelier Olaf Scholz l'avait promis à l'OTAN après le déclenchement de la guerre en Ukraine, d'où le nom de l'association.

    Cependant, la condition préalable à la capacité opérationnelle de la « Chancellor Division » est sa modernisation numérique, car – et ce n’est pas étonnant – la Bundeswehr est également aux prises avec la numérisation ; elle est particulièrement en retard par rapport aux autres partenaires de l’OTAN. Mais tout cela a tourné à la farce et a encore une fois provoqué le ridicule parmi les partenaires de l’alliance. Apparemment, le service des achats de la Bundeswehr à Coblence, responsable des équipements radio, n'avait pas communiqué correctement avec l'autre service des véhicules. Résultat : la Bundeswehr dispose désormais de radios numériques ultramodernes, mais dans leur état actuel, elles ne rentrent pas dans les véhicules qui leur sont destinés. Aujourd’hui, l’ensemble du processus d’installation a été retardé d’au moins un anEt cela coûtera également beaucoup plus cher.

    Ce n’est pas le premier incident coûteux de la BundeswehrAu contraireL’armée allemande a une histoire peu glorieuse en matière de système d’approvisionnementQu'il s'agisse de radios, de drones ou d'armes à feu, rien ne se passe comme prévu

    Des fusils qui ne sont pas opérationnels.

    Lors du déploiement en Afghanistan, les soldats de la Bundeswehr se sont rendu compte que leurs fusils n'étaient malheureusement pas adaptés au tir. 

    En effet, le fusil standard de la Bundeswehr, le G36, avait une fâcheuse caractéristique :

    -          * Le canon de l'arme devenait si chaud après plusieurs centaines de coups que la précision diminuait rapidement. À une distance de 300 mètres, seul un tir sur trois a atteint sa cible. Le commandement opérationnel s'est donc senti obligé de conseiller aux soldats d'étudier les instructions d'utilisation dans ce cas de figure qui consiste à laisser le canon "refroidir jusqu’à ce qu’il soit possible de le tenir à la main sans se brûler" !

     

    Un drone de reconnaissance inadapté

    Peu de temps auparavant, Thomas de Maizière, alors ministre fédéral de la Défense (2011 – 2013), est arrivé dans ce ministère avec une réputation de « Ministre Flawless» (impeccable). Mais, après s’être complètement fourvoyé en initiant la commande d’un drone de reconnaissance, il a ensuite été surnommé « Ministre Clueless » (désemparé) par les membres de la commission de la Défense du Bundestag.

     La  La raison de la perte rapide de réputation du ministre est la débâcle relative à l'acquisition du drone de reconnaissance « Euro Hawk », qui a coûté aux contribuables une somme à trois chiffres en millions. Le drone géant était destiné à utiliser sa technologie de capteurs pour écouter les conversations téléphoniques et autres communications à haute altitude et les signaler par radio, à la station au sol. Mais ce projet d'un million de dollars a connu une fin encore moins glorieuse que les radios inadaptées ou le fusil, qui n'était que partiellement utilisable : le super drone de Maizière n'a jamais été mis en service du tout. Car il est rapidement devenu évident que l’appareil commandé aux Etats-Unis, n’était pas autorisé à voler en Allemagne... Lorsque le ministre a finalement arrêté le projet, 300 millions d'euros avaient déjà été gaspillés.

    Mais Thomas de Maizière ne faisait que perpétuer une vieille tradition au sein de la Bundeswehr

     

    Une nouvelle usine pour faire plaisir à qui ? 

    Ursula von der Leyen lui a succédé en tant que ministre fédérale de la défense /12/2013 – 17/07/2019). Dès le mois de décembre 2013, alors que l’armée lui reproche ses méthodes de travail, elle est régulièrement accusée de mauvaise gestion du budget de son ministère. Arrivée pour mettre de l’ordre dans les contrats d’armement et remédier à l’obsolescence du matériel militaire, il lui est reproché de n’accomplir cette mission que partiellement. Des avions de chasse et de transport militaire resteront cloués au sol et de nombreux hélicoptères ne seront jamais en état de voler…

    Aujourd’hui encore, personne ne sait vraiment qui a eu cette idée (tous les hauts-fonctionnaires du ministère nient en être responsables) selon laquelle la Bundeswehr avait besoin d’une usine pour produire ses propres médicaments et produits cosmétiques. Au total, environ 20 millions d'euros ont été consacrés à la construction de la nouvelle usine avant que le Contrôle fédéral des finances estime que la Bundeswehr obtiendrait nettement moins cher si elle commandait ses produits cosmétiques tels que les sprays nasaux, les crèmes solaires ou les sticks de protection pour les lèvres auprès de la société  « Rossmann » fournisseur historique de l’armée. 

     

    Des aéroglisseurs qui ne glissent pas !

     L'achat des aéroglisseurs est également devenu une blague - tous les prototypes testés ont lamentablement échoué lors des tests, ils ne glissaient pas !  Lorsque les « turbulences » ont finalement cessé et que le projet a été arrêté, des millions supplémentaires avaient déjà été dépensés. 

    En Allemagne le nom d'Ursula von der Leyen est surtout lié à un scandale en tant que ministre de la Défense.

    L’histoire remonte à 2018. Un rapport de la Cour fédérale des comptes l’épingle pour l’attribution de 375 contrats à des consultants externes pour un projet informatique entre 2015 et 2016. Un recours jugé abusif et qui représente 250 millions d’euros de dépenses pour le ministère de la Défense.

    L’autre problème, c'est qu'une partie de ces contrats a été attribuée sans l’appel d’offres prévu dans ce cas. Ursula von der Leyen a reconnu que tout n’était pas clair mais elle a insisté sur le besoin de "savoir-faire extérieurs". C'est pourquoi la Commission défense du Bundestag, le Parlement allemand, a ouvert une commission d’enquête.

    Car pendant ces années où Mme von der Leyen a dirigé le ministère allemand de la Défense, celui-ci a accumulé les problèmes de gestion, les dizaines de millions d'euros dilapidés sans contrôle pour payer des consultants, conseillers et autre sous-traitants privés. "Il y en a pour près de 100 millions", affirme l'hebdomadaire Focus, en se basant sur un rapport d'enquête qui vient d'être rendu public et qui s'avère "dévastateur" pour l'ex-ministre.

    Ce rapport qui a nécessité un an de travail, a été rédigé par les députés issus de l'opposition ayant participé à la commission d'enquête parlementaire sur cette affaire. Les conclusions des députés Verts, libéraux-démocrates et du Parti de Gauche qui sont accablantes, reprises également par  Der Spiegel : « Sous l’égide de Ursula von der Leyen, le ministère de la Défense est devenu une mine d’or pour McKinsey » …/… « le rapport d'enquête de l'opposition met en avant la responsabilité inévitable de l'ex-ministre, qui était tenue au courant des problèmes rencontrés à cause de tous ces contrats, mais n'a jamais fait mine de mettre fin aux mauvaises pratiques. La gestion du ministère a été "un échec complet", dixit le rapport, avec des procédures de contrôle des contrats de consulting qui n’étaient pas respectées, et cachaient souvent des liens de copinage, de connivence entre hauts fonctionnaires et lobbyistes privés ». 

    Pire encore, rappelle Politico, Ursula von der Leyen a tenté de faire obstruction à l'enquête parlementaire, quand on s'est rendu compte que ses deux téléphones portables professionnels saisis pour les besoins de l'enquête avaient été consciencieusement expurgés de tout message avant d'être livrés à la commission…

    A présent "il n'y a plus guère de doute sur la raison véritable qui a poussé Ursula Von der Leyen à fuir à Bruxelles" résume le chef du service investigation de Die Welt, Wolfgang Büscher pour qui l'ex-cheffe de la Bundeswehr est bien coupable, je cite, d'avoir laissé ces "oiseaux parasites que sont les consultants privés faire leur nid au ministère de la Défense", d'avoir donné les clés de la Défense nationale, à travers ces lobbyistes, aux intérêts des grandes compagnies du secteur de l'armement en particulier. 

     

    Bévues en série

    Avec Christine Lambrech)  qui a succédé à Mme Von der Leyen en tant que ministre de la Défense du 08/12/2021 au 17/01/2023.

    Mais au début janvier 2023, Christine Lambrecht, fragilisée par une série de gaffes, a présenté sa démission au chancelier Olaf Scholz, dans une déclaration transmise à la presse. Cette démission intervenait au moment où l'Allemagne était de nouveau mise sous pression par la Pologne pour livrer des chars à l'Ukraine.

    Âgée de 57 ans, ex-ministre sociale-démocrate de la Justice dans le précédent gouvernement de coalition d'Angela Merkel, Christine Lambrecht avait enchaîné les bévues depuis le début de la guerre en Ukraine, le 24 février. Elle avait suscité les critiques de Kiev en annonçant l'envoi de 5.000 casques, quand le régime de Volodymyr Zelensky demandait des armes lourdes.

    Une vidéo dans laquelle elle présentait ses vœux début janvier lui avaient aussi valu railleries et critiques. La ministre y apparaissait dans le centre de Berlin, décoiffée par des bourrasques, en train d'évoquer la guerre en Ukraine entre deux explosions de pétards et de feux d'artifices, particulièrement prisés des Allemands pour fêter la nouvelle année : « Une guerre fait rage au milieu de l'Europe. J'ai pu en tirer de nombreuses impressions particulières », glissait en outre la ministre au sujet de l'invasion russe, évoquant « beaucoup, beaucoup de rencontres avec des gens intéressants et formidables ». « Pour cela, je dis un grand merci » …

     

    Les craintes de la Cour des comptes pour l’avenir

    La construction d'une « salle de simulation cible » pour 16 millions d'euros est devenue elle aussi, « légendaire ». Le seul problème était que l'écran de projection de la salle ne pouvait pas être nettoyé des traces laissées par les munitions et les balles

    Selon le Contrôle fédéral des finances, même l'appareil de nettoyage fabriqué à partir de poils d'oreilles de bovins sud-américains, commandé pour un million d'euros, s’est révélé inopérant. 

    Les critiques de la Cour des comptes à l'égard de l'acquisition d'armes légères, qui n'étaient que partiellement adaptées aux besoins des troupes, ont été encore plus dévastatrices. Et chaque fois que le sujet de la gestion inefficace de la flotte revient sur le tapis, les auditeurs de la Cour s'écharpent vigoureusement.

     

    Une déroute financière généralisée ?

    Les auditeurs de la Cour des comptes craignent que cela ne soit que le début d’une déroute financière généralisée, et que la situation puisse encore empirerUne fois que la Bundeswehr aura accès à la totalité les ressources du fonds spécial de 100 milliards, on peut craindre une vague de gaspillage encore plus importante. Car, selon le raisonnement évident des auditeurs de la Cour, si le ministère fédéral de la Défense de la Bundeswehr ne parvient déjà régulièrement pas à effectuer des achats à une échelle restreinte, comment va-t-il procéder à l'avenir avec des achats à grande échelle, beaucoup plus coûteux ?

     

    Construction de nouveaux sous-marins

    En septembre dernier, Boris Pistorius, ministre fédéral de la Défense, a visité le chantier naval de Thyssenkrupp Marine Systems GmbH, pour inaugurer les débuts de la production de six nouveaux sous-marins de classe 212CD. 

    D'ici 2034, quatre sous-marins de la nouvelle classe 212CD seront construits pour la Norvège et deux pour la marine allemande. Tout le monde croise les doigts pour qu’ils soient pleinement opérationnels et qu’il n’y ait pas de voies d’eau intempestives sur les parties les plus sensibles d’un navire, comme les joints, les vannes ou les évents…

    Mais, selon la commissaire à la défense du Bundestag, ce ne sont pas 100 mais 300 milliards d’euros dont a besoin la Bundeswehr pour devenir pleinement « opérationnelle », ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui« Nous n’avons pas assez de chars pour pouvoir nous entraîner, il nous manque aussi des bateaux, des navires et des avions », s’est-elle inquiétée, soulignant qu’en raison des équipements livrés à l’Ukraine la Bundeswehr est aujourd’hui encore plus sous-équipée qu’elle ne l’était avant le 24 février 2022…

    Selon Sun Tzu (L'Art de la guerre)  : « La confusion et le désordre dans une armée offrent la victoire à l’adversaire ».  Force est de constater que la Bundeswehr n'est pas la Wehrmacht. (1) 

     

     1 -  Mot allemand signifiant "puissance de défense" et qui devint en 1935 le nom officiel des armées du IIIe Reich, à l'exclusion des formations armées du parti nazi, les SS.         

     

     

     

     

     

     

     

    Partager via Gmail Yahoo!

    1 commentaire
  • ALLEMAGNE - RUMEURS DE GUERREEn août 2016, déjà, un journal allemand, le « Frankfurter Allgemeine Zeitung»,  révélait que le gouvernement s'apprêtait à demander à la population de faire des réserves de vivres et d'eau dans le cadre d'un nouveau projet de défense civile, le premier depuis la fin de la Guerre froide.

    Deux litres d’eau par personne et par jour pour une durée de cinq jours, des réserves de nourriture pour dix jours, suffisamment de sources d’énergie et d’argent liquide… Le plan de défense civile que le gouvernement fédéral allemand s’apprête à présenter mercredi en conseil des ministres a des relents de Guerre froide. Le dernier plan de ce type est resté en vigueur jusqu’en 1989.

    Ce document, long de 69 pages, envisage en détail les mesures à adopter pour faire face à une catastrophe de grande ampleur :

    « La population doit pouvoir être autonome pendant une durée de dix jours avant l’arrivée des secours », stipule le texte, qui rappelle la nécessité pour l’Etat de prendre un certain nombre de mesures. Soit « d’élaborer un système d’alarme fiable à l’échelle nationale, d’augmenter les réserves d’essence, de vaccins, d’antibiotiques et de tablettes d’iodure de potassium, de renforcer la sécurité des bâtiments ou encore d’installer des zones de décontamination devant les hôpitaux pour y soigner les blessés en urgence»

    ALLEMAGNE - RUMEURS DE GUERREPlus récemment, une campagne d’affichage nationale, rappelait aux Allemands, la nécessité de faire des réserves de nourriture et d’eau…

    Mars 2022 - Le « Zeitenwende » « changement d’époque » est annoncé par Olaf Scholz, le chancelier allemand, concrétisé depuis par la création d’un fonds spécial de 100 milliards d’euros afin de remettre à niveau les capacités militaires du pays. Il faut se rappeler que la Bundeswehr a été créée en 1955, sous la subordination de l’OTAN ; la chute du mur de Berlin et l’effondrement de l’Union soviétique se sont traduits par le délitement de ses capacités militaires, dû à un sous-investissement chronique, par ailleurs favorisé par une opinion publique plutôt pacifiste.

    27 juin 2023 - Le porte-parole de la politique de défense de l'Union au Bundestag, Florian Hahn (CSU), critique le ministre de la Défense Boris Pistorius (SPD) pour son annonce du stationnement de 4.000 soldats de la Bundeswehr (nom de l’armée allemande) en Lituanie. "De telles avancées non coordonnées perturbent non seulement nos soldats et nos partenaires de l'OTAN, mais aussi le ministère fédéral de la Défense, qui a été complètement surpris par les projets de son propre ministre", a déclaré Hahn à l'Augsburger Allgemeine.

     

    L'Allemagne souhaite stationner en permanence une force de combat de 4 000 hommes en Lituanie pour renforcer le flanc oriental de l'OTAN. Avant le sommet de l'OTAN dans la capitale Vilnius, Boris Pistorius a annoncé de manière inattendue le transfert d'une brigade dans ce pays frontalier de la Russie et de la Biélorussie, lors d'une visite en Lituanie. Dans l’état actuel des choses, la Lituanie pourrait devenir la plus grande base militaire de la Bundeswehr à l’étranger.

    Octobre 2023 - Cela étant, cet effort budgétaire allemand ne sera pas suffisant sans un changement de mentalité outre-Rhin. Et M. Pistorius n’a pas hésité à utiliser le mot « guerre ». Un mot qui a claqué comme un coup de tonnerre.

    « Nous devons nous habituer à nouveau à l’idée qu’il pourrait y avoir une menace de guerre en Europe », en effet déclaré le ministre allemand de la Défense. Et cela « signifie que nous devons nous préparer à la guerre, que nous devons être capables de nous défendre et d’y préparer la Bundeswehr et la société », a-t-il ajouté.

    « Vous ne pouvez pas vous préparer à un danger que vous ne percevez pas et n’acceptez pas. Les prochaines années seront consacrées à l’utilisation des fonds spéciaux et à la restructuration des structures de la Bundeswehr. Mais il faut du temps pour inverser 30 années d’échecs », a-t-il ajouté. En évoquant les « échecs de 30 ans », Pistorius impute la responsabilité principale de l’état de désolation de la Bundeswehr à l’ancienne chancelière Angela Merkel.

    Il y a quelques mois, la ministre fédérale des Affaires étrangères Annalena Baerbock a fait la une des journaux en affirmant que « les États de l'UE menaient une guerre contre la Russie »…

     

    Boris Pistorius l'a déjà commenté sur ZDF. « Nous devons nous habituer à nouveau à l'idée qu'il pourrait y avoir une menace de guerre en Europe. Et cela signifie : nous devons nous préparer à la guerre. Nous devons être sur la défensive. Et préparer la Bundeswehr et la société à cela », a-t-il déclaré directement dans l'émission ZDF Berlin.

    L’OTAN et la Russie se dirigent-elles vers une guerre ouverte ?

    ALLEMAGNE - RUMEURS DE GUERRECette crainte est nourrie par Harald Kujat.  De 2002 à 2005, il a été président du Comité militaire de l'OTAN, du Conseil OTAN-Russie et de la Commission des chefs d'état-major OTAN-Ukraine et, en tant que président du Comité militaire de l'OTAN, le général le plus haut gradé de l'OTAN. 

    Dans une interview accordée à Deutsche Wirtschaftsnachrichten, il explique pourquoi la Crimée – et pas tant le Donbass – est au centre des efforts offensifs ukrainiens et pourquoi l'UE en particulier devrait faire tout ce qui est en son pouvoir pour parvenir à une paix négociée. Le temps presse.

    En 1997, le Traité fondamental OTAN-Russie et le Conseil OTAN-Russie ont entamé une phase de coordination politique étroite et de coopération militaire aux niveaux politique et militaire. L’objectif commun était de renforcer la confiance mutuelle et la coopération. Le Conseil OTAN-Russie était un forum de consultation, de coordination et, dans la mesure du possible, de prise de décision et d'action conjointes sur des questions de sécurité d'intérêt commun. Le résultat fut une détente politique et un désarmement militaire significatifs.

    Mais, précise Harald Kujat : « Le danger de la situation actuelle est avant tout que la Russie et les États-Unis ne se perçoivent plus comme des puissances dirigeantes stabilisatrices ayant des systèmes ou des idéologies globales, bien qu'opposés, mais néanmoins des intérêts stratégiques mutuellement respectés, mais se considèrent essentiellement comme des représentants des intérêts nationaux."

    Le tournant stratégique dans les relations entre l’OTAN et la Russie, a été la résiliation unilatérale par les États-Unis du traité ABM de 1972 sur la défense des missiles balistiques intercontinentaux en juin 2002. Il existe un lien factuel étroit entre le Traité ABM et l’Accord sur la limitation des armes offensives stratégiques intercontinentales basées sur terre et en mer.

    Cette décision a été considérée par la Russie comme une tentative de modifier l’équilibre stratégique en faveur des États-Unis. D’autant plus que l’OTAN a commencé à planifier son propre système de défense antimissile, qui est désormais déployé en Pologne et en Roumanie en tant que système de défense antimissile balistique. La Russie craint qu'il puisse également être utilisé pour attaquer ses silos de missiles balistiques intercontinentaux, mettant ainsi en danger sa capacité de frappe en réponse, en cas d'attaque contre les intérêts Russes.

    Le tournant politique a été le sommet de l’OTAN à Bucarest en 2008, au cours duquel le président américain Bush a souhaité inviter l’Ukraine et la Géorgie à en devenir membres. La France et l'Allemagne en particulier ont voté contre. Pour sauver la face du président américain, une perspective de l'OTAN a été incluse dans le communiqué des deux États. Le président géorgien Saakachvili a profité de cette occasion pour reconquérir l’Ossétie du Sud séparatiste, ce qui a été empêché par l’utilisation des forces russes. Par la suite, les tensions entre l’Occident et la Russie se sont sensiblement aggravées. L'OTAN a suspendu le Conseil OTAN-Russie et l'Ukraine est devenue de plus en plus le centre de tensions.

    La rivalité entre la Russie et les États-Unis confère également à la guerre en Ukraine une dimension géopolitique. Les États-Unis sont l’un des principaux acteurs de cette guerre. Car sans leur soutien financier et militaire massif, l’Ukraine ne serait pas en mesure de se défendre. Les États-Unis soutiennent l'Ukraine non seulement par des livraisons d'armes, par la formation de soldats ukrainiens, par la fourniture d'informations importantes - il suffit de penser à l'incident entre un avion de combat russe et un drone de reconnaissance américain au-dessus de la mer Noire - par des conférences de planification conjointes. Le chef d'état-major Saluzhnyi l'a récemment expliqué dans une interview, en coordination téléphonique avec le chef d'état-major américain, une fois par semaine.

    En fin de compte, cette guerre concerne aussi les intérêts géostratégiques des États-Unis. Ils veulent ouvertement affaiblir la Russie politiquement, économiquement et militairement afin de pouvoir se concentrer davantage sur leur véritable rival géopolitique, la Chine. Parce que les États-Unis ne seraient pas en mesure de mener une guerre sur deux fronts contre la Russie et la Chine. La Chine est le seul État capable de rivaliser avec les États-Unis dans son rôle de puissance mondiale dominante. Et la menace de guerre à propos de Taiwan est bien réelle. Cette constellation crée des risques indubitables pour l’Europe. La Première Guerre mondiale a été décrite comme la grande catastrophe du XXe siècle. 

    La guerre en Ukraine pourrait devenir la grande catastrophe du XXIe siècle.

    Selon Harald Kujat, « la Crimée apparaît comme une pomme de discorde particulière dans le conflit, encore plus que les régions russophones du Donbass.

    La Russie dispose de deux avantages stratégiques majeurs dont l’Ukraine doit se priver si elle veut réaliser quelque chose. L’une d’entre elles est la capacité de la Russie à frapper des cibles en Ukraine à des distances de 3 000 km ou plus. Avec l’aide des systèmes de défense aérienne occidentaux modernes, l’Ukraine peut défendre Kiev. Mais il est incapable de protéger l’ensemble du pays, y compris les installations stratégiques clés, car il ne peut pas arrêter les rampes de lancement et les avions pour empêcher de telles attaques.

    C’est pourquoi elle fait appel à des systèmes d’armes occidentaux à longue portée tels que les missiles de croisière air-sol américains ATACMS et allemands Taurus.

    Le deuxième avantage stratégique de la Russie est la Crimée, plaque tournante logistique des troupes russes en Ukraine. Par conséquent, l’objectif de l’offensive ukrainienne, en cours depuis le 4 juin, est de réaliser une percée à travers les positions défensives russes profondément échelonnées et d’avancer jusqu’au pont terrestre Russie-Crimée afin de rompre la connexion. Le manque de succès jusqu’à présent a conduit l’Ukraine à attaquer à nouveau le pont de Kertch et à vouloir attaquer les navires et les ports russes de la mer Noire afin de perturber l’approvisionnement des forces armées russes.

    Les forces ukrainiennes auraient franchi la première ligne de défense russe. S'il était possible d'avancer jusqu'au pont terrestre Russie-Crimée et d'interrompre les approvisionnements russes, cela aurait un impact majeur sur l'efficacité au combat des forces armées russes, mais n'entraînerait pas la défaite militaire de la Russie.

    Les États-Unis ont mis en garde à plusieurs reprises l’Ukraine contre le franchissement d’une ligne rouge et l’attaque de la Crimée. La Russie considère la Crimée comme un territoire russe et si la Crimée est séparée de la Russie, l'approvisionnement de ses deux millions d'habitants sera également interrompu. C'est pourquoi la première explosion du pont de Kertch a déclenché des semaines d'attaques en représailles contre l'infrastructure d'approvisionnement ukrainienne.

    La Crimée revêt également une grande importance stratégique pour la Russie. Car la Crimée, avec Sébastopol, assure à la Russie la possibilité de dominer la mer Noire, condition préalable à un accès sans entrave à la Méditerranée. La Russie craint que si l'Ukraine rejoint l'OTAN, Sébastopol ne devienne une base navale américaine et que la mer Noire ne devienne la « chasse gardée » de l'OTAN. »

    A la question du journaliste : « Y a-t-il un risque d'escalade supplémentaire du conflit et quel rôle les considérations géopolitiques et de politique intérieure américaines y jouent-elles avant les élections de l'année prochaine ? »

    Harald kujat répond :

    « Il existe avant tout un risque d’extension du conflit et, par conséquent, d’escalade. Dans cette guerre, l'Occident a renforcé l'efficacité au combat des forces armées ukrainiennes en fournissant des armes toujours plus récentes et plus puissantes, mais ce faisant, il a également donné une impulsion significative à l'escalade de la guerre sans atteindre son objectif de transformer la situation stratégique globale en la faveur de l'Ukraine.

    Chaque nouveau système d’armes était présenté comme un « changement de donne », suscitant des espoirs irréalisables. En réalité, la motivation de poursuivre la guerre a accru les pertes humaines et la destruction du pays. Les États-Unis tempèrent ainsi les attentes élevées quant à la livraison des avions de combat F-16, que le président ukrainien a déjà qualifié d'étape historique.

    En Allemagne cependant, la livraison de missiles de croisière air-sol Taurus est une fois de plus présentée comme une étape décisive vers une victoire militaire de l’Ukraine. Cette implication toujours plus profonde encourage l’expansion de la guerre en Ukraine vers une guerre pour l’Ukraine, vers une guerre européenne majeure.

    La situation du personnel des forces armées ukrainiennes est déjà critique et les systèmes d’armes ne peuvent compenser les pertes. L’Occident devra donc bientôt décider s’il autorise ou non les soldats occidentaux à suivre les armes occidentales.

    Jusqu’à présent, les États-Unis ont exclu une confrontation directe avec la Russie. Rien ne changera à l’approche des élections. Cependant, la question qui jouera un rôle dans la campagne électorale est de savoir si les citoyens américains sont prêts à continuer à engager des dépenses financières extrêmement élevées pour financer l’État ukrainien et la guerre.

    En avril dernier, des membres républicains du Congrès et des sénateurs avaient déclaré qu'ils ne soutiendraient plus une aide américaine illimitée à l'Ukraine « à moins que les futurs programmes d'aide ne soient associés à une stratégie diplomatique claire pour mettre rapidement fin à cette guerre ». Cette discussion pourrait influencer le résultat des élections. S’il est élu, Trump mettra fin à la guerre en Ukraine, a-t-il déclaré, dans les 24 heures. Mais il existe également d’autres hommes politiques influents qui souhaitent mettre fin à la guerre.

    Alors que les États-Unis s’efforcent d’affaiblir la Russie et donc l’axe Moscou-Pékin, la guerre en Ukraine a donné une nouvelle dynamique à ce centre de pouvoir

    Je ne vois pas que les Etats européens s'efforcent sérieusement de renforcer l'affirmation politique, économique et militaire de l'Europe. Ils ont travaillé en étroite collaboration avec les États-Unis dans la guerre en Ukraine. Les dirigeants de l’Union européenne ont adopté des sanctions très sévères contre la Russie et continuent de suivre cette voie, même s’ils avaient promis au début de la guerre que les sanctions obligeraient la Russie à mettre un terme à son attaque et n’auraient aucun impact sur les États européens. Ni l’un ni l’autre ne s’est produit.

    Ce moteur d’affirmation européenne de soi  manque aujourd’hui."

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Partager via Gmail Yahoo!

    votre commentaire
  • Le traité de Maastricht 30 ans après : le bilan - 1ère partie

    Le trentième anniversaire du traité de Maastricht n’a fait l’objet d’aucune célébration ni même d’évocation… On pourrait s’en étonner si on se rappelle les slogans enthousiastes, chargés en promesses idylliques, qui avaient prévalu pendant la campagne référendaire de 1992 au détriment des partisans du « non » systématiquement marginalisés voire stigmatisés par l’ensemble des médias, des responsables politiques et de certaines « vedettes » du monde du spectacle…  Malgré ce déchaînement médiatico-politique, le « oui » l’avait emporté de justesse par 51,04% des suffrages. C’était le 20 septembre 1992.

    Ce texte fondamental comportait des dispositions qui ont profondément façonné le continent européen en général, et la France en particulier. En trente ans, le traité a eu le temps de produire ses effets et nous avons le recul nécessaire pour en évaluer les conséquences concrètes à l’aune des promesses qui avaient été faites, et en dresser le bilan.

    Le traité de Maastricht, camisole de force des nations

    1 ) L’euro – instauré par ce même traité, existe depuis le 1er janvier 1999 sous forme électronique et depuis le 1er janvier 2002, sous forme fiduciaire, soit depuis 23 ans et 20 ans.

    2) Sans débat et sans explication aux populations, le traité de Maastricht a donné naissance de façon implicite à une Europe fédérale. Il a donné le traité sur l’Union européenne (TUE) qui a modifié en profondeur le traité de Rome (1957) qui a muté en un « traité instituant la Communauté européenne », lequel a de nouveau muté en 2008 (après le referendum de 2005 où le « non » l’avait emporté)en «traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), nom sous lequel nous le connaissons actuellement. 

    Le traité de Maastricht définit trois piliers sur lesquels repose l’Union européenne :

    1)      Les Communautés européennes, celle du charbon et de l’acier (CECA) instaurée en 1951 par le traité de Paris ; la Communauté économique européenne (CEE) instaurée en 1957 par le traité de Rome ; la Communauté européenne de l’énergie atomique (CEEA ou Euratom, instaurée en même temps que la CEE).

    Le traité de Maastricht apporte plusieurs modifications substantielles aux « Communautés européennes » dont il fixe les principes ad vitam æternam . Les traités ne pouvant être modifiés qu’à l’unanimité des Etats membres (27 aujourd’hui) qui ont des intérêts divergents dans tous les domaines. Il s’est avéré impossible de les mettre tous d’accord en même temps pour une réorientation profonde de la « construction européenne »…

    Concrètement, cela signifie que les politiques en matière agricole, commerciale ou encore les contraintes budgétaires inscrites dans les traités s'appliquent de façon immuable, quels que soient les dirigeants de l'Union européenne et, a fortiori, quels que soient les dirigeants des Etats membres. 

     

    Exemple : l'article 32 du TFUE fixe pour toujours,  à la Commission européenne, l'objectif de « promouvoir les échanges commerciaux entre les Etats membres et les pays tiers ». De fait, il n'existait avant le tournant des années 1990 que des accords commerciaux avec des pays proches des Etats de la CEE, devant préfigurer leur possible adhésion à l'ensemble européen : l'Association européenne de libre-échange fondée en 1960 (ses membres qui n'ont pas rejoint l'Union européenne sont la Suisse, la Norvège, l’Islande et le Liechtenstein) ou l'accord d'association de 1958 avec Monaco.

     

    Après le traité de Maastricht, les traités de libre-échange ont été multipliés avec quasiment toutes les zones du monde (CETA avec le Canada ; le Mercosur : Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay et Venezuela ; le TAFTA avec les USA ; et l’accord avec la Nouvelle-Zélande), dans des conditions où les intérêts commerciaux et industriels français ne sont globalement pas pris en compte…

    Le traité de Maastricht élargit le principe de la libre circulation des capitaux aux transferts financiers en Etats membres et Etats tiers, alors que l’Acte unique de 1986 n’imposait cette libre circulation qu’entre Etats membres…  

    Le traité de Maastricht bannit également toute restriction entre Etats membres et Etats tiers s’agissant des paiements, donc en particulier, des rapatriements de dividendes. 

    Ces règles sont contenues dans l’article 63 du TFUE et sont à l’origine de nos problèmes :

    - Les délocalisations massives survenues à partir des années 1990 (auparavant, les sorties de capitaux vers les Etats non-membres nécessitaient le cas échéant l’autorisation du ministère des Finances).

    - Empêchent les Etats de lutter contre certaines fraudes monétaires.

    - Interdisent aux Etats d’empêcher le rachat de certaines entreprises nationales par des intérêts étrangers…

    C’est ainsi que le 14 septembre 2005, Neelie Kroes, commissaire européenne à la Concurrence au sein de la Commission européenne Barroso 1, avait fait plier Jacques Chirac et le gouvernement français, pourtant théoriquement souverain, en imposant la cession du sidérurgiste Arcelor à des intérêts anglo-indiens. Elle l'avait justifié en ces termes: 

    « Confrontés à l'insécurité et à une perte de confiance collective, certains politiques sont prompts à rechercher des politiques régressives de repli sur soi. Ils veulent protéger des champions et des marques nationaux - ou même européens - des assauts du marché mondial pour relancer les canards boiteux de l'industrie. Nous ne pouvons pas nous permettre d'être complaisants face à la résurgence actuelle de la rhétorique protectionniste. Le risque est à la fois réel et urgent

     

    Notez au passage que Neelie Kroes est typique de ces personnalités sulfureuses promues par une oligarchie pour occuper les postes de pouvoir de l'Union européenne maastrichtienne. Dépourvue de toute légitimité démocratique, elle a été propulsée dans ses fonctions grâce à ses liens avec des milieux d'affaires - touchant des jetons de présence dans un nombre invraisemblable de conseils d'administration (une trentaine !), notamment américains, et même avec des milieux mafieux, étant proche, par l'intermédiaire d'un homme d'affaire local, de l'organisation d'un célèbre gangster hollandais, Willem Holleeder, spécialisé dans les extorsions de fonds, les enlèvements crapuleux et le blanchiment d'argent sale… 

     

    2)      Le deuxième pilier du traité est la « Politique étrangère et de sécurité commune » (PESC). Le traité de Maastricht introduit une subordination de toute défense européenne à l’OTAN par l’article 42 du TUE :

     

    « La politique de l’Union au sens de la présente section n’affecte pas le caractère spécifique de la politique de sécurité et de défense de certains Etats membres, elle respecte les obligations découlant du traité de l’Atlantique Nord pour certains Etats membres qui considèrent que leur défense commune est réalisée dans le cadre de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), et elle est compatible avec la politique commune de sécurité et de défense arrêtée dans ce cadre. »

    Cet article 42 postule une seule et même politique de défense, la mise en place d'une armée européenne ainsi que le respect des obligations imposées par l'appartenance à l'Otan des Etats qui font partie de cette dernière (en pratique la quasi-totalité des Etats de l'Union européenne). C'est pour cette raison d'ailleurs que les Etats-Unis ont insisté pour faire entrer les pays de l'ancien bloc soviétique d'abord dans l'Otan puis dans l'Union européenne. 

    En pratique, lorsque la France s'est opposée en 2003 à la guerre en Irak, elle l'a fait contre la volonté de la plupart des autres Etats membres de l'Union européenne et de l'Otan, et donc en contradiction avec la PESC qui impose, en définitive, un alignement complet sur les volontés de Washington.

    C'est bien ce à quoi l'on assiste de façon flagrante dans l'actuel conflit ukrainien. Les classes dirigeantes des pays européens ont tellement intégré l'idée qu'elles doivent obéir aux Etats-Unis qu'elles n'osent même pas formuler l‘hypothèse, pourtant avancée avec insistance pour de nombreuses raisons logiques et techniques, que Washington ait pu commanditer ou réaliser directement le sabotage des gazoducs Nord Stream 1 et 2…

    3) Enfin, le troisième pilier du traité de Maastricht est la coopération policière et judiciaire en matière pénale. Ce troisième pilier a donné lieu notamment au « mandat d'arrêt européen », entré en vigueur le 1" janvier 2004, qui permet à la justice d'un Etat membre de demander une arrestation dans un autre Etat membre. A la différence d'une extradition, décidée par un gouvernement, donc une autorité politique, le mandat d'arrêt européen relève strictement d'une procédure judiciaire, automatique pour peu que les conditions en soient remplies, et à l'extérieur de toute considération politique. 

    Mis en œuvre au prétexte de lutter contre le terrorisme, le mandat d'arrêt européen a, par exemple, empêché Julian Assange de trouver refuge dans un pays de l'Union européenne. Faisant l'objet d'un mandat d'arrêt européen émis par la Suède, il était en effet promis à l'arrestation s'il avait essayé de fuir dans un pays de l'Union européenne. 

    A côté des « trois piliers », le traité de Maastricht institue également une «citoyenneté européenne ».Les citoyens européens ont ainsi le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des autres Etats membres, mais aussi de voter et de se porter candidat aux élections municipales et européennes. Le concept de « citoyenneté européenne» opère un découplage entre citoyenneté et nationalité, au détriment de cette dernière que la « construction européenne» s'emploie en permanence à  « dépasser», folkloriser, dénigrer et, finalement, vider de son sens.

    Le traité de Maastricht 30 ans après : le bilan - 1ère partie

     

    Le rôle des Etats-Unis dans la mise en place de l’Euro 

    L'élément central du traité de Maastricht, sans doute le plus connu, est cependant la mise en place de «l'Union économique et monétaire » (UEM) ainsi que de ses règles de convergence budgétaire et d'harmonisation entre Etats membres, destinées à assurer la pérennité de la monnaie commune européenne. 

    Les célèbres « critères de Maastricht », au nombre de cinq, forment sur le papier un splendide jardin à la française dans les allées duquel des économies très disparates sont priées de s'aligner : 

    -       -    Avoir des prix stables, le taux d'inflation annuel d'un Etat membre donné ne devant pas dépasser de plus de 1,5 point la moyenne de ceux des trois Etats membres présentant les taux d'inflation annuels les plus bas ; 

    -      -   Avoir des taux d'intérêt à long terme qui ne sont pas supérieurs de plus de 2 points de pourcentage à ceux pratiqués dans les trois pays ayant l'inflation la plus faible (le «spread ») ;  

    -      -   Présenter une dette publique (Etat et administrations publiques, y compris organismes de sécurité sociale) inférieure à 60% du PIB ; 

    -      -   Présenter un déficit public (même périmètre) n'excédant pas 3% du PIB ; 

    -        -  Avoir appartenu au « système monétaire européen » de manière continue les deux années précédant leur entrée dans l'UEM. 

    Les origines réelles de l'euro sont en revanche moins connues. 

    L'idée de la monnaie commune européenne ne nait pas, en effet, avec le traité de Maastricht, ni même dans des cerveaux       "européens".

    La déclassification des archives du département d'Etat américain à l'été 2000 pour les années 1950 et 1960 a ainsi éclairé d'un jour nouveau la genèse de la monnaie commune européenne.

    Le journaliste britannique Ambrose Evans-Pritchard du Daily Telegraph a expliqué-dans un article retentissant du 19 septembre 2000, tiré de ces archives et intitulé « Des fédéralistes européens financés par des chefs de l'espionnage américain» - comment les dirigeants de la Commission européenne dans les années 1960 étalent parrainés par le département d'Etat américain et les fédéralistes européens financés par des organismes proches de la CIA.

    Il écrivait en particulier :

    "Une note émanant de la Direction Europe [du département d'Etat], datée du 11 juin 1965, conseille au vice-président de la Communauté économique européenne, Robert Marjolin, de poursuivre de façon subreptice l'objectif d'une union monétaire. Elle recommande d'empêcher tout débat jusqu'au moment où "l'adoption de telles propositions serait devenue pratiquement inévitable." 

    D’après cette note,  Il est notable que le Français Robert Marjolin confie à ses interlocuteurs américains son souhait de circonvenir la volonté des Etats et des peuples européens, en leur imposant de façon subreptice une union monétaire, qui n'est pas envisageable dans l'immédiat à l'époque compte tenu des « résistances. 

    Le vice-président de la CEE montrait alors son empressement à servir les desiderata des Etats-Unis, qui est la marque de fabrique des dirigeants européistes à travers les époques.

    L'intérêt de son propre pays de même que celui des cinq autres membres de ce qui est alors « l’Europe des Six » passe au second plan.

    Robert Marjolin était en outre le mieux placé pour savoir que Charles de Gaulle était alors en opposition frontale avec la Commission européenne, présidée par le juriste allemand Walter Hallstein, proche des autorités nazies de 1930 à 1944.

    Le fondateur de la France Libre allait d’ailleurs provoquer – moins de trois semaines après cette réunion à Washington – la célèbre « crise de la chaise vide » qui allait durer du 30 juin 1965 au 30 janvier 1966, jusqu’à l’éviction de Walter Hallstein de son poste de président de la Commission européenne…

     

    A suivre…

     

     

     

     

     

    Partager via Gmail Yahoo!

    1 commentaire


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique