• Des insectes dans votre assiette : vraie solution ou fausse bonne idée ?

    par Anne-Charlotte FRAISSE

    Des insectes dans votre assiette : vraie solution ou fausse bonne idée ?

     

    En novembre 2022, un pain de mie aux céréales vendu à Intermarché était rappelé car jugé "impropre à la consommation".

    En cause? La présence de vers et d'insectes dans les paquets. Alors que cette information suscite un dégoût bien légitime, d'autres entreprises françaises font le pari fou d'inverser la vapeur et de nous faire consommer des insectes, volontairement cette fois-ci.  Mais si cette pratique venait à se généraliser, des dérives ne seraient-elles pas à craindre au même titre que n'importe quelle industrie agroalimentaire ?

     En Chine,à la fin de l'été 2022,une véritable usine à cochons a vu le jour : un immeuble de vingt-cinq étages, capable d'accueillir 600 000 porcs ! D'autres édifices du même type sont en construction dans le pays, afin de répondre à la demande des consommateurs...

     

     

    Est-ce la bonne solution pour nourrir les 9 milliards d'humains à I'horizon de 2030 ?

    Quand on sait par exemple que les grillons ou les vers de farine sont riches en protéines et en nutriments, et que quarante grillons fournissent l'équivalent protéique d'une portion de viande, on peut questionner les choix faits à l'aune de leurs implications écologiques.

    En France, on consomme 12 tonnes d'insectes par an, ce qui n'est pas beaucoup comparé à la consommation de viande annuelle de 1,55 million de tonnes juste pour le boeuf ! Pourtant, nombreux sont les pays qui ont généralisé l'usage alimentaire des insectes : cigales au Malawi ; grillons en Thaïlande ; chapulines ou sauterelles au Mexique ; larves de guêpes jaunes au Japon ; chenilles mopanes un peu partout sur le continent africain...

    Selon I'Organisation des nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), 2,5 milliards d'humains dans le monde consomment des insectes de    façon régulière, alors pourquoi pas nous ?

    Nuisibles ou sources de protéines ?

    D'autant que certains insectes considérés comme nuisibles pourraient nous être bénéfiques. Au Mexique par exemple, les plants de luzerne sont ravagés par une variété de sauterelles, les Sphenarium purpurascens. Alors les «pêcheurs de sauterelles », à l'aide de filets, les ramassent pour les consommer grillées. On estime que chaque famille locale bénéficie à cette période de 50 à 70 kg de sauterelles à déguster. 

    Le ténébrion, insecte ravageur des céréales, qu'elles soient entières ou moulues, que l'on appelle aussi le ver de farine, est une superbe source de nutriments écologiquement intéressants que l'on peut également élever pour nourrir les poules !

     

    Si vous vous lancez dans l'élevage pour votre propre consommation, il est recommande de ne pas consommer la première génération que vous aurez achetée en animalerie, en raison de son régime alimentaire. Préférez les générations suivantes que l'on prendra soin de nourrir avec de la farine et des petits morceaux de légumes biologiques, comme des épluchures de carottes.

     

    Une mine de nutriments incroyable.

    Dans les insectes, on trouve en proportion variable selon les espèces, tous les acides aminés essentiels constituant les protéines, du zinc, du fer, des acides gras poly et monoinsaturés, mais aussi du calcium, du phosphore, du magnésium, de l'iode et du sélénium.

    Les champions de la teneur en protéines sont les sauterelles, les grillons et les criquets, pour peu que leur  alimentation soit équilibrée ! Une étude montre que les sauterelles nourries au son contiennent plus d'acides amines essentiels que celles nourries au maïs.

    Meme idée pour les acides gras essentiels : on pourra bientót remplacer le saumon par des vers à soie, des fourmis blanches ou des sauterelles. Ces dernières ont par exemple 60% d'acides gras insaturés, 44 % d'acide oléique et 1,4% d'acide linoléique.

    En ce qui concerne le fer, vous pouvez laisser tomber la viande rouge : les insectes en ont au moins autant, si ce n'est plus ! On estime que pour 100g de poids sec de boeuf, il y a environ 6 mg de fer. Chez les criquets migrateurs, c'est de 8 à 20 mg pour 100 g et chez les chenilles, 35,5 mg pour 100g. 

    On peut donc sans risques affirmer que les insectes, en cas de famine,sont des alliés nutritifs de choix.

     

    Dans la gamelle des animaux ?

    On le sait, la part des terres cultivables dédiées à l'alimentation des animaux d’élevage est immense, la demande croît et les terres manquent.

    La solution gain de place se trouve, peut-être, chez les insectes. Une étude montre que lon peut remplacer 50 % de la nourriture habituelle des poissons d'élevage sans que cela n'affecte leur qualité. Les essais sur les porcelets montrent même, qu'apporter des insectes dans leur alimentation, améliore leur santé intestinale!

    Enfin, pour les volailles, l'étude PROteINSECT montre que les poulets, nourris avec des régimes alimentaires en contenant, ont eu les mêmes résultats que ceux nourris avec de la nourriture classique.

    Et, sachez qu'il est même possible de trouver des croquettes aux insectes pour vos animaux de compagnie !

     

    Des risques sanitaires encadrés

    Depuis que la FAO a, en 2013, encouragé la consommation d'insectes, que s'est-il passé sur le plan réglementaire pour nous prémunir des risques potentiels ?

    J'ai posé la question à une professionnelle du secteur, Julie Gervreau, présidente de la société Mucronutris, qui commercialise, en France, des insectes comestibles.  Selon elle, les contraintes sanitaires pour les insectes sont les mêmes que dans tout le secteur agro-alimentaire : hygiène et propreté, analyses bactériologiques,suivi de l'eau et respect des dates de péremption.

     

    La nourriture des élevages est aussi un facteur important de préservation de la qualité (des légumes frais, sans pesticides ou fongicides, biologiques, pas d'antibiotiques. Ainsi que la façon dont ils sont préparés ensuite : une déshydratation à basse température préserve les qualités nutritionnelles et gustatives.

    Julie Gervreau ajoute que les risques de contamination sont plus maitrisés en usine que dans la nature et nous met en garde : comme pour les champignons, il faut s'y connaltre en insectes, choisir son coin pour les ramasser en vue de les consommer éventuellement.

    En effet, les insectes peuvent accumuler des métaux lourds présents dans leur environnement.

    Dans certaines zones où les insectes sont fréquemment collectés pour être consommés, on constate une diminution de leur population due à la dégradation de leurs habitats par la pollution, les incendies et la surexploitation.

     

    Et la souffrance animale ?

    Si les insectes devaient être élevés en grand nombre, dans des structures adaptées, se pose alors la question de leur bien-être.

    La fondatrice de Micronutris se veut rassurante: les vers de farine n'ont pas de système nerveux, donc ne ressentent pas la douleur. Les autres sociétés d'élevage français vantent également les mérites de la congélation qui, selon eux, permet aux insectes de passer l'arme à gauche sans souffrance.

     

    Quant à la surpopulation dans les bacs d'élevage, les larves aiment la promiscuité, c'est en grandissant qu'il faut leur donner plus d'espace. 

     

    En Europe :

    Si le vers de farine et le criquet migrateur ont été autorisés officiellement par la Commission européenne en 2021, en 2022, c'est le grillon domestique qui a été approuvé sur le marché alimentaire.

    Alors que l'on recense plus de 2 000 espèces consommées à travers le monde, on voit qu'il y a fort à faire avant la mise sur le marché de tous les insectes comestibles.

     

    Vous en avez consommé sans le savoir !

    Vous connaissez sûrement le E120, parfois appelé pudiquement "colorant naturel"... Il s'agit  en fait, de la couleur rouge obtenue grâce à ce petit insecte  nommé cochenille, que l'on retrouve facilement dans énormément de produits pour en rehausser la couleur : charcuteries (chorizo), bâtonnets de crabe, bonbons, laitages au goût de fruits rouges, confitures, jus et sirops de fruits rouges, glaces, tarama, ou encore, dentifrices avec de belles lignes rouges... Vous avez donc consommé  des insectes, même si vous ne le saviez pas...

     

    Si vous êtes allergiques aux crustacés

     

    Si vous avez des problèmes d'allergies aux crustacés, aux araignées, aux acariens et aux mollusques, passez votre chemins, les insectes appartenant au groupe des arachnopodes sont susceptibles de réveiller chez vous des réactions allergiques identiques.

    Si vous souhaitez consommer des insectes : enlevez les pattes et les ailes des grillons avant ingestion ; ils sont irritants et peuvent provoquer de graves constipations nécessitant parfois une intervention chirurgicale. 

    Il faut faire de même si vous projetez de manger des sauterelles, des criquets ou des scarabées grillés...

     

    Sources :

    www.cnews.tr/mander2022-08-1Vchine-une-mega-fermne-de-26 etages-va-accueiilr-600000-porcs-1252961

    https://food.ec.europa.eu/safety/novel-food/authorisations.lr

    Estimation de la FAO

    www.planetoscope.com/elevage-viande/1587-consommation-de-viande-en-france html

     

    http://dumas.ccsd cnrs.fr/dumas-03125122/document

    .Environ 60 % de protéines dans les insectes comestibles c'est beaucoup ! Source:Morales-Ramos JA Rojas MG,Shapiro-Ilan D·Insects as Food for Insectivores,in édteurs Mas Production of Beneficial Organisms ·.Son Diego Academic Press.201

     

    Yi Lakemond ·Extraction and characterisation of protein fractions from five insect species".Food Chem.2013

    Ademolu,Iowu,Olatunde "Nutritional  Value Assessment of Variegated Grasshopper, Zonocerus vanegatus(L)(Acndoidea: Pygomorphidae) Durng Post-Embryonic Development·,Biology.2010 1

    Raheem.Raposo et al.·"Entomophagy:Nutritional,ecological, satety and leqsiation aspects".Food Research international vol 126.2019

    .Données disponibies dans·"Nourrir le monde de demain : avantages et risques de l'entomophagie". Sciences du Vivant. page 46.2020.

     www.proteinsecteu/ndex.phg7d=35

    Projet européen dont le but est de promouvoir la consommation d'insectes www.proteinsecteu

    .Bednarska Agnieszka etal.·Reguation of Body Metal Concentrations:Toxicokinetics of Cadmium and Zinc in Crichets+,Ecotoxicology and Environmental Sefety 119,2015

     

    .Barre,Caze-Subra et al."Entomophagie et risque allergique", Rev Fr Allergol 2014

     

     

     

     

     

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